Quinton : l’inventeur de l’eau de mer à injecter

Il est le contemporain de Pasteur, mais n’a pas conservé de postérité. René Quinton a pourtant brillé à son époque en mettant en évidence l’exceptionnel pouvoir de l’eau de mer sur l’organisme et son utilité pour détoxiquer les cellules. Il lui a même permis d’obtenir le statut de médicament.


Né en 1866 en Seine-et-Marne, René Quinton est fils d’un médecin installé à Chaumes-en-Brie. Destiné aux études scientifiques, il choisit de contrer la décision familiale et opte pour la littérature. Il se veut l’héritier de Flaubert et s’essaye à écrire romans et pièces de théâtre. Puis sa curiosité le porte vers la biologie, la géologie, ainsi que la paléontologie, qu’il étudie au Muséum d’histoire naturelle.
Selon ses biographes, c’est devant une vipère en hibernation dans sa propriété familiale de Bourgogne que René Quinton élabore sa première théorie à l’âge de 29 ans. Alors qu’elle se réveille installée au soleil, il réalise que les reptiles sont apparus dans un climat chaud, à une époque où la température était élevée et constante. Il en déduit sa loi de constance thermique.
Ses recherches en autodidacte sur l’origine de la vie le font ainsi remarquer par le célèbre professeur Étienne-Jules Marey, qui l’accueille au Collège de France en 1897, alors qu’il n’est pourvu d’aucun diplôme scientifique. Ce nouveau poste lui permet, en plus de bénéficier d’une reconnaissance scientifique, de poursuivre ses expérimentations.
C’est là qu’il élabore des travaux sur les origines marines des cellules animales et de la vie sur terre.

Sang et eau de mer
Il démontre ainsi que le liquide de notre milieu intérieur possède une composition quasiment identique à celle de l’eau de mer, qui contient les différents minéraux indispensables à la vie, avec pour seule différence la concentration saline. Ce qui explique pourquoi les cellules constitutives des organismes tendent à se maintenir dans le milieu marin originel. Il est l’un des premiers à montrer l’importance des oligoéléments et révolutionne l’état des connaissances de l’époque.
René Quinton aurait réalisé ses premières expériences en injectant de l’eau de mer diluée (isotonique) à un chien vidé de son sang. Son organisme assimile les éléments dont il a besoin. Au bout de quatre jours d’injection, les taux de globules rouges et blancs remontent et l’animal parvient à survivre.
Des expériences similaires sont conduites sur des enfants de faible constitution qui retrouvent un poids normal après des injections d’eau de mer transformée selon son procédé. Il démontre ainsi que l’eau de mer isotonique est le meilleur liquide pour le corps humain, car les minéraux et oligoéléments sont difficilement absorbables uniquement par l’alimentation. Pour bien assimiler un minéral, une combinaison d’autres minéraux est nécessaire. L’eau marine, après avoir été traitée, notamment par un filtrage à froid, permet leur assimilation par l’organisme et une meilleure fixation. Les minéraux, comme le calcium et le magnésium contenus dans l’eau de mer, sont ainsi absorbés par l’organisme, car ils sont rendus biodisponibles et peuvent être assimilés par le corps humain. L’eau contient également des éléments organiques (acides aminés, vitamines) qui ont des effets thérapeutiques. Ce plasma marin sert ainsi à enrichir le plasma sanguin.
Au tout début du XXe siècle, René Quinton a donc été le premier à envisager l’injection d’eau de mer dans le corps, alors que son utilisation thérapeutique s’était depuis l’Antiquité toujours limitée aux bains.

Plus de problèmes de peau
En 1907, René Quinton ouvre son premier dispensaire marin à Paris, où il pratique des injections d’eau de mer à ses patients. Le succès est tel que de nombreux dispensaires ouvrent en province. Il réalise des clichés de ses patients, avant et après les traitements, afin de mesurer la disparition des problèmes de peau, ainsi que la remise en forme d’enfants souffrant de rachitisme. Les troubles de la nutrition et la dermatologie sont les deux domaines où Quinton affiche des résultats spectaculaires. En 1904, la parution de son livre, L’Eau de mer, milieu organique, lui permet d’exposer sa grande découverte : l’utilisation en injection de l’eau de mer en sous-cutané et son procédé d’extraction.
Mais la Première Guerre mondiale le contraint à interrompre ses recherches, car il s’engage dans l’artillerie. Il meurt peu de temps après, en 1925, à l’âge de 58 ans, d’une crise cardiaque. Il était au sommet de sa gloire.

L’eau de mer façon Quinton
René Quinton n’a pas été seulement le fondateur d’une thérapie, il a aussi découvert un procédé d’extraction et de transformation de l’eau de mer, nommé depuis le procédé Quinton. Il s’agit de pomper l’eau de mer dans les vortex (tourbillons marins) loin des côtes, de la stériliser par microfiltration à froid, et non par le procédé de désodation qui consiste en une suppression du sodium par électrolyse, ce qui induit un chauffage. À partir de 40 °C, il existe un risque d’altérer la qualité de l’eau de mer avec l’apparition de radicaux libres qui créent un dessèchement, c’est-à-dire l’inverse de l’effet recherché. Selon le procédé Quinton, les différents filtrages successifs à froid permettent d’éliminer la charge microbactérielle qui pourrait subsister.
Deux variantes d’eau de mer seront fabriquées par Quinton :
  • Le plasma de Quinton, qui possède la même concentration en sel que le corps humain. Une baisse de concentration rendue possible grâce à une dilution avec une eau de source faiblement minéralisée pour ne pas perturber les interactions des minéraux. L’eau de mer isotonique, du fait de son identité avec l’eau du corps, permet aux cellules d’absorber les nutriments. Le corps peut alors éliminer les toxines et renouveler les cellules du tissu extracellulaire. Ce plasma de Quinton injectable a été prescrit et remboursé jusqu’en 1982.
  • L’hypertonique, eau de mer non diluée. Du fait que l’eau de mer est plus concentrée en sel que le corps humain, elle exerce une pression qui empêche les cellules d’ouvrir leurs parois. Cette formule d’eau de mer permet de lutter contre la fatigue, le stress, la dépression.

La renaissance de Quinton
Aujourd’hui, le savoir-faire de Quinton est repris par un laboratoire espagnol installé à Alicante, dans le sud-est de l’Espagne, depuis 1996. C’est là que sont conditionnés les ampoules et spray d’eau de mer, pompée aujourd’hui dans les vortex du golfe de Gascogne. Le protocole d’extraction de l’eau et le filtrage à froid sont identiques aux techniques d’origine.
Le laboratoire voudrait remettre sur le marché l’eau de Quinton sous la norme pharmaceutique, et obtenir la fameuse AMM (autorisation de mise sur le marché) perdue en 1982 par le laboratoire précédent. Le laboratoire souhaite que les injections dans le sang de ce sérum vivant puissent être relancées et que le plasma de Quinton puisse être à nouveau apprécié à sa juste valeur

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