Stades et artères pleins à craquer : Analyse sur des mobilisations trompeuses !


Les campagnes électorales sont l’occasion pour les candidats de s’accorder des bains de foule pour jauger leur légitimité. Selon leurs poids, leurs images et les localités, les candidats font fortune diverse quant à leur capacité de mobilisation. Cependant, il y a lieu de s’interroger sur la sincérité de ces marées humaines qui accompagnent toujours les politiciens dans leurs différentes sorties.


Croyant qu’il sait mobiliser plus que ses rivaux, le candidat Macky Sall ne cesse de demander à ses adversaires d’abandonner les caravanes et d’essayer les stades. En tant que président sortant, le candidat de la coalition « Bennoo Bokk Yaakaar » ne rencontre aucune difficulté pour rassembler ses souteneurs dans un lieu. 
Qui plus est, les militants qui répondent à l’invite du chef de l’Etat sortant sont convoyés dans les stades à coût de millions CFA rien que pour le transport, le ‘perdium’ et la prise en charge. Alors il n’y a pas de merveille de voir des marées humaines, des personnes toutes habillées des couleurs du parti, se former autour du candidat sortant. 
Ces gens ne sont pas tous des militants ; il y en a qui sont de simples curieux et d’autres qui viennent juste pour faire plaisir à leur mentor au niveau de leurs villages, quartiers ou même ASC. 
L’arrivée d’un président est toujours l’opportunité pour ces leaders locaux de se faire adouber et rien de mieux que de convaincre les voisins, même s’ils ne sont pas forcément acquis à la cause du chef de parti.
Il suffit de bien observer cette guerre des pancartes dans les meetings du président sortant pour se rendre compte de la fortune dépensée lors des meetings.
Voilà donc ce qui explique parfois la différence entre les foules que draine la mouvance présidentielle et celles qui accompagnent les candidats de l’opposition. Sans transport ni ‘perdium’, l’opposition déroule sa campagne à travers majoritairement des marches et caravanes. 
Cette stratégie qui n’est pas liée à un manque de moyens a le mérite d’être doublement payante. Non seulement elle rapproche les leaders de leurs sympathisants en favorisant la communion avec les votants dont ils courent après les voix mais aussi elle permet de jauger de manière sincère la popularité de l’homme politique. Durant ces marches et caravanes, la masse qui suit la procession le fait avec beaucoup de liberté et de sincérité.
Contrairement aux meetings où les personnes sont convoyées et ne pourraient rentrer qu’après le discours du candidat, les « caravaniers » s’octroient souvent le droit de suivre ou de ne pas suivre, de rester ou de quitter le candidat quelle que soit l’heure. 
Ainsi il va sans dire que les foules des caravanes qui sortent de manière spontanée sont plus sincères que celles des stades, lesquelles sont généralement transportées et récompensées. 
Une vidéo tournée lors du meeting du président sortant à Thiès me réconforte dans cette thèse puisque des femmes drapées des couleurs du parti au pouvoir déclarent rester fidèles à un candidat autre que celui pour lequel elles étaient venues. 
Elles confessent avoir été au meeting de Macky Sall parce qu’elles sont mobilisées par un groupement (association féminine) et donc sans beaucoup de conviction.
En vérité, les foules drainées lors des meetings et caravanes ne sont pas forcément un baromètre pour anticiper sur les voix à récolter. Certes, elles demeurent un instrument de mesure de la popularité du candidat. Remplir les stades ou les grandes artères à travers des mobilisations dispendieuses ne suffit pas pour mesurer sa côte de popularité comme devraient le permettre les marches et les caravanes. 
En 2012, surtout lors du deuxième tour, le président Wade mobilisait des foules monstrueuses au niveau de la VDN et certains parlaient de regroupement de millions de personnes. Les nombreux bains de foule que Wade s’est octroyé pour un troisième mandat n’ont pas empêché sa chute. 
Contrairement aux marches et caravanes, les meetings ne permettent pas non plus d’être en contact avec toutes les populations et donc réduit les chances de les convaincre toutes. Alors, que Macky Sall se targue de remplir les stades qu’il harangue sans cesse et invite par la même occasion l’opposition à faire de même me semble impertinent en ce sens que ce que Wade n’avait pas réussi avec les foules, aucun autre candidat ne peut espérer le faire. La masse est complexe et ses motivations pour suivre tel ou tel candidat ne sont jamais saisissables.
Ababacar GAYE

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