Le prix Sakharov revient au dissident ouïghour emprisonné Ilham Tohti

Le professeur d'université, bloggueur, et membre de la minorité ouïghour chinoise, Ilham Tohti a été condamné à la prison à vie mardi, pour séparatisme, alors qu'il est connu pour son opposition à une séparation du Xinjiang d'avec le reste de la Chine.
Le Parlement européen demande la libération « immédiate » d'Ilham Tohti, intellectuel ouïghour de la province chinoise du Xinjiang. L'instance de Strasbourg a décerné ce jeudi 24 octobre le prix Sakharov pour la liberté de l'esprit à cet ancien professeur d'économie dans une université de Pékin, condamné à la prison à vie pour « séparatisme ».





C'est la deuxième récompense en deux mois pour Ilham Tohti de la part de l'Europe. Le 30 septembre déjà, l'ancien universitaire avait reçu le prix Vaclav-Havel décerné par le Conseil de l'Europe pour avoir « donné une voix à tout le peuple ouïghour ». Mais cette fois, la récompense est encore plus prestigieuse, et ne manquera pas d'irriter Pékin.
À travers ce prix, Ilham Tohti inscrit en effet son nom aux côtés de lauréats comme Malala Yousafzai, Kofi Annan, le dissident chinois Hu Jia, mais surtout Nelson Mandela, titulaire de la récompense en 1988.
C'est une reconnaissance mondiale pour ce professeur de l’université des Minorités à Pékin, qui a œuvré toute sa vie pour une cœxistence harmonieuse entre les Hans, l’ethnie majoritaire en Chine à 92 %, et les Ouïgours, cette minorité musulmane de langue turque vivant au Xinjiang, dans le nord-ouest chinois.
Réputation de modéré
Pékin accuse Ilham Tohti d'être un « séparatiste soutenant le terrorisme extrémiste », c'est-à-dire de prôner l'indépendance du Turkestan oriental, nom donné par les indépendantistes ouïghours au Xinjiang. L'ex-professeur avait ainsi été condamné en 2014 à la prison à perpétuité dans un procès dénoncé comme une parodie de justice par les organisations internationales des droits de l'homme.
Avant son arrestation en janvier 2014, Ilham Tohti avait fondé le site internet UighurOnline, qui traite en chinois et en ouïghour des problèmes sociaux aux Xinjiang. Il avait déjà acquis la réputation d'un modéré attirant l'attention sur les tensions ethniques dans cette province située aux marges de l'Empire du Milieu.
Critiques américaines sur l'internement des Ouïghours au Xinjiang
Son site a été fermé dès son arrestation qui n'était pas la première. Déjà en 2009, il avait été détenu après avoir écrit sur les Ouïghours tués ou enfermés à la suite des émeutes interethniques en juillet de cette année-là à Urumqi, capitale provinciale du Xinjiang.
Cette récompense à Ilham Tohti intervient aussi alors que les membres du Congrès américain critiquent fortement la détention de plus d'un million de Ouïghours et autres ethnies musulmanes dans des camps d'internement au Xinjiang. Les États-Unis ont ce mois-ci mis sur « liste noire » 28 entités chinoises liées à la répression dans cette province du nord-ouest de la Chine.

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