14 voix pour le RHDP parti-unifié et 6 voix contre le RHDP parti unifié sur un total de 20 votants, lors de la Réunion du Bureau politique du PDCI-RDA du 17 Juin dernier et, au final, la déclaration de la victoire des « 6 voix contre », la proclamation de la défaite des « 14 voix pour ».
Autrement dit une minorité aurait imposé son choix lors de cette réunion en utilisant des moyens anti-démocratiques. Par la violence, les hués et la confiscation de la parole, une fraction idéologique minoritaire à l’intérieur PDCI-RDA a disqualifié de manière organisée une majorité démocratique. Ce serait la victoire volée de la dictature contre la démocratie à l’intérieur du parti en vue de la présidentielle 2020.
S’il s’avérait que cette accusation est fondée, il faudrait alors s’inquiéter de la prétention de cette fraction du PDCI, à se réapproprier l’Etat ivoirien et à exercer le pouvoir à partir de 2020 car elle fut l’architecte de l’ethno-nationalisme qui rompit l’unité nationale de la Côte d’Ivoire dans les années 1995.
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La dénonciation contestatrice de voix d’autorités au PDCI-RDA, telles celles de l’Ambassadeur et ancien Ministre Bernard Ehui-Koutoua, pour ne citer que lui, contre ce déni de démocratie, atteste de la gravité de ce scandale politique majeur dans notre pays.
L’épisode de ce déni interne de démocratie véhicule un message sans équivoque : la pulsion antidémocratique qui pousse la fraction ethno-nationaliste du PDCI vers le FPI extrémiste et nationalitaire et ses divers satellites, relève d’une attraction de type idéologique et programmatique. L’anti-houphouëtisme minoritaire d’une fraction oligarchique au sein du PDCI-RDA tente d’en dévoyer l’esprit à des fins mercenaires.
L’alliance potentielle du PDCI ethno-nationaliste et du FPI national-populiste et de ses satellites qui se dessine à l’horizon est, selon toutes les évidences, une coalition opportuniste explosive de dictateurs et d’autocrates en herbe ou déjà confirmés dans l’exercice du pouvoir. Cette interprétation est certifiée par le ralliement quasi-assuré de la fraction du leader générationnel en rupture de ban non-assumée avec le RDR.
C’est un front antirépublicain et anti-démocratique qui se dresse contre le Front républicain et démocratique RHDP afin de renverser les conquêtes démocratiques du peuple ivoirien.
Analysant les discours et les pratiques des divers protagonistes de l’échiquier politique ivoirien, j’avais anticipé et dénoncé cette évolution à plusieurs reprises. J’avais appelé à une nouvelle coalition RHDP éclairée par l’esprit de l’houphouëtisme, expression ivoirienne de la démocratie républicaine. (Cf. « Pour une nouvelle coalition politique éclairée par l’esprit de l’houphouëtisme », cedea.net, Février 2018.)
La chute des masques qui révèle à l'opinion publique ivoirienne le visage grimaçant de la dictature dans une fraction du parti, prouve éloquemment que le passage indiscriminé du témoin au profit du PDCI au sein du RHDP, ne va pas de soi. Cette alternance indiscriminée représenterait un danger mortel contre la démocratie républicaine car le PDCI est grevé par une fraction ethno-nationaliste activiste et virulente.
Le déroulé de l’imposture démocratique au sein du parti démontre que cette fraction est encline à recourir à des moyens antidémocratiques pour se réapproprier le pouvoir d’État afin d’appliquer son programme nationaliste d’exclusion fondé sur le « Nous ou Eux ». Une vision autocratique du pouvoir s’est dévoilée en cette imposture.
Le dévoilement au grand jour de la nature autocratique et du programme ethno-nationaliste de cette fraction du PDCI qui s’était déjà affirmé sans équivoque lors de la présidentielle de 2015, donne raison aux prévenances pragmatiques et à la prudence politique du Président de la RépubliqueAlassane Ouattara. Ce démasquage certifie l’utilité politique de la formule politique RHDP parti -unifié.
Le parti-unifié est bel et bien le garant de la continuité de l’Houphouëtisme qui est, rappelons-le, un nationalisme libéral républicain et démocratique fondé sur l’alliance des identités ethniques et de la rationalité moderne. Cette coalition pérenne, qui fait de l’inclusion et de reconnaissance réciproque des identités son leitmotiv, est ancrée dans la base sociologique de la Côte d’Ivoire. Elle la reflète politiquement.
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Elle assure l’unité nationale. Elle est le bastion protecteur de la Côte d’Ivoire contre la division nationale. Elle est la garantie de la paix sociale, de la stabilité politique et du développement économique en Côte d'Ivoire. J’avais justifié argumentativement et conceptuellement ce propos dans la contribution suivante qu’il importe de revisiter. (Cf. « En quoi le RHDP parti-unifié est-il le garant de la paix sociale, de la stabilité politique et du développement économique en Côte d’Ivoire ? », cedea.net, 15 juin 2018)
Sous la personnalisation du débat politique, comme je l’ai souvent souligné, se cachent des logiques et des projets anti-démocratiques et antirépublicains. L’urgence de recentrer l’affrontement politique ivoirien sur les programmes et les projets sociétaux est confirmée par ce scandale interne qui suscite, au sein du PDCI, un courant de résistance d’houphouëtistes de conviction contre l'imposture démocratique.
Ce n’est pas Alassane Ouattara qui veut monopoliser le pouvoir d’État en trompant son allié Henri Konan Bedié. Ce n’est pas le RDR qui veut s’y maintenir en flouant son partenaire le PDCI–RDA. Ce n’est pas le RHDPqui veut se transformer en parti-unique afin de tuer la démocratie et ramener politiquement la Côte d’Ivoire en arrière comme se plaisent à l’affirmer les propagandistes, les medias incorporés et les intellectuels organiques des partis intéressés.
Une grille rationnelle de lecture doit être appliquée à la problématique de l’affrontement politique ivoirien autour du RHDP parti unifié pour en révéler la logique objective interne. Elle laisse voir que le chef d’un État démocratique et représentant d’une majorité politique libérale veut préserver le régime de démocratie républicaine pluraliste en renforçant un front républicain RHDP devant la menace ethno-nationaliste et populiste.
Elle montre qu’un bloc libéral progressiste de centre-droit veut pérenniser ses acquis politiques économiques et sociaux contre des blocs antilibéraux, anti-démocratiques et antirépublicains de type extrémiste. Les prises de position, les discours et les pratiques des protagonistes accréditent cette interprétation.
Ce ne sont pas des personnes qui luttent pour s’approprier l’Etat ivoirien afin d’en faire un usage privé. Ce sont deux visions du monde, deux programmes et deux projets sociétaux antithétiques qui s’affrontent pour conquérir le pouvoir d’Etat afin de mettre en œuvre leur vision opposée respective de la Côte d’Ivoire.
C’est une vision du monde, un projet sociétal et programme politique houphouëtiste d’inclusion et d’intégration qui affronte une vision du monde, un projet sociétal et un programme politique anti-houphouëtiste d’exclusion et de désintégration.
Il importe au plus haut de recentrer l’affrontement et le débat politique ivoirien sur cette contradiction programmatique et sociétale.