Emmanuel Macron dénonce "un raccourci fatal" entre lutte contre le terrorisme et islam

Le chef de l'Etat est arrivé à la mi-journée à Toulouse. Il a débuté son séjour dans la Ville rose par une visite d'Airbus avec la chancelière allemande Angela Merkel. Les deux chefs d'Etat se sont entretenus cet après-midi avec les neuf ministres français ainsi que les 13 représentants allemands présents.

Centre-ville interdit aux voitures, camions de CRS en force, patrouilles : le centre-ville de Toulouse est placé sous haute sécurité ce mercredi. Le président de la République Emmanuel Macron, la chancelière allemande Angela Merkel et plusieurs ministres des deux pays participent au Conseil des ministres franco-allemand organisé aujourd'hui.

Emmanuel Macron est arrivé en fin de matinée à Toulouse avant d'accueillir la chancelière allemande Angela Merkel chez Airbus pour visiter la chaîne de montage de l'Airbus A350. Ce biréacteur, le dernier né de la gamme Airbus, est un succès commercial depuis son lancement. Le chef de l'Etat a voulu en faire le symbole de la réussite européenne.

Emmanuel Macron et Angela Merkel ont rencontré des salariés d'Airbus qui travaillent sur la chaîne de l'A350. - Photo AFP
Emmanuel Macron et Angela Merkel ont rencontré des salariés d'Airbus qui travaillent sur la chaîne de l'A350. - Photo AFP

Vers 13h30, les deux dirigeants européens ont déjeuné avec une dizaine de lycéens et des apprentis qui ont bénéficié de l'action "Avion campus des métiers".

Objectif : échanger sur leur parcours de formation et leur expérience chez Airbus. Le déjeuner a eu lieu au sein même d'un A350. Il s'agit d'un des cinq prototypes installé à l'extérieur de l'usine Roger Béteille à Blagnac.

"Nous tenions à venir aux côtés d'Airbus pour dire notre confiance dans l'entreprise et tout ce qui est devant elle. Vous allez construire le futur de cette entreprise. Il y a parfois des moments de doute et d'inquiétude mais c'est une entreprise formidablement solide. Et aussi dire confiance dans l'apprentissage qui très fort en Allemagne et sommes en train de le développer en France", a déclaré Emmanuel Macron.

Le repas avec les lycéens et apprentis est organisé au sein même d'un A350. - Photo DR
Le repas avec les lycéens et apprentis est organisé au sein même d'un A350. - Photo DR

Au menu ce déjeuner servi à l'intérieur de l'Airbus, de la charcuterie "Noir de Bigorre", des fromages régionaux ou encore du parmentier de canard du Sud-Ouest. En dessert, un Pavlova aux fruits et une salade de fruits. Retrouvez ci-dessous le menu servi aux chefs de l'Etat réunis ce mercredi à Toulouse.

Des spécialités locales au menu ce mercredi. - DR Elysée
Des spécialités locales au menu ce mercredi. - DR Elysée

Angela Merkel et Emmanuel Macron se rencontrent pour un entretien bilatéral à la préfecture de Haute-Garonne à partir de 15 heures. La session plénière du Conseil des ministres franco-allemand doit débuter à 16h30. Au menu du Conseil : les questions climatiques, industrielles, de défense et de sécurité.

Emmanuel Macron a accueilli Angela Merkel à 15h15 à la préfecture de Toulouse. Ils se sont brièvement salués alors qu'ils avaient déjà déjeuné ensemble ce midi lors de leur passage par Airbus, avant de rentrer à l'intérieur du bâtiment pour ce conseil des ministres franco-allemand qui devrait durer près de 3 heures.

Selon nos informations, Angela Merkel et Emmanuel Macron ont décidé de se rendre au conseil de défense européen qui se tient actuellement au palais Niel juste derrière la préfecture.

Autour de la table, les ministres des Affaires étrangères ainsi que leurs conseillers étaient présents. Le président de la République a "salué" l'assemblée et a également souligné "qu'il était heureux de participer à ce type de format".

Réunion surprise pour le duo franco allemand. - DR
Réunion surprise pour le duo franco allemand. - DR

Après le passage au Palais Niel, les ministres se sont prêtés au jeu de la photo officielle devant la préfecture de Toulouse.

Photo officielle avant le conseil des ministres européens. - DDM FREDERIC CHARMEUX
Photo officielle avant le conseil des ministres européens. - DDM FREDERIC CHARMEUX

À l’issue de ce 21e conseil des ministres franco-allemand, Emmanuel Macron et Angela Merkel ont tenu un point presse.

Les dossiers "chauds" abordés lors du point presse

Rarement sans doute un conseil des ministres franco-allemand n’avait été aussi attendu. Parce qu’il s’inscrit dans le contexte houleux des attaques turques envers les Kurdes basés en Syrie.

Parce que le rejet de la candidature de Sylvie Goulard par la future présidente de la commission européenne, l’allemande Ursula Von Der Leyen – arrivée par ailleurs à la préfecture pour dîner avec les deux chefs d’État en début de soirée – a alimenté les rumeurs de tensions envers les deux alliés historiques européens. Passage en revue des déclarations du président sur ces dossiers chauds.

L’offensive turque envers les Kurdes

Interrogé par un journaliste allemand à l’issue des deux discours des chefs d’État lors de la conférence de presse conjointe de fin de conseil sur la question du rôle du couple franco-allemand face au président turc Erdogan, qui « s’attaque à l’ange-gardien du combat contre Daesh », Emmanuel Macron a rappelé la position claire des deux pays : « Avec l’Allemagne, nous sommes clairs sur le fait de condamner l’offensive turque en Syrie, car cette attaque est en effet de nature à aider Daesh à renaître de ses cendres.

Il faut convaincre de stopper cette offensive avec nos partenaires de l’Otan. Nous souhaitons prendre des initiatives au sein du traité de l’Atlantique nord au sujet de la Turquie pour continuer pression, dialogue et résolution de cette crise et de cette situation inacceptable. »

Les tensions entre France et Allemagne

Dans son discours, Emmanuel Macron a évoqué de lui-même le sujet : « J’entends parfois dire que la situation franco-allemande est difficile, mais c’est en réalité la situation mondiale qui est difficile. S’il n’y avait que nous deux, que nos deux pays, croyez-moi, les choses iraient très bien et avanceraient beaucoup plus vite. »

Par le biais des nombreux accords annoncés ou renforcés entre les deux pays voisins, les deux dirigeants ont voulu faire passer le message clair que les relations resteraient bonnes malgré les difficultés rencontrées récemment.

Le Brexit

Les deux chefs d’État ont affiché leur optimisme sur les chances d’un accord sur le Brexit, alors que doit se tenir ce jeudi à Bruxelles un sommet européen : « Je veux croire qu’un accord est en train d’être finalisé et que nous pourrons ainsi le consacrer demain (aujourd’hui, ndlr) », a déclaré Emmanuel Macron. « Je pense de plus en plus que nous obtiendrons cet accord. Nous sommes dans le sprint final », a confirmé de son côté la chancelière.

Le droit voisin

Autre sujet abordé par le président français : les droits voisins, qu’Emmanuel Macron compte bien faire respecter par les géants du numérique.

« Certains acteurs comme Google veulent s’en affranchir. Nous ne laisserons pas faire et très clairement demandons aux autorités nationales et européennes de la concurrence d’examiner et d’engager au plus vite toutes les procédures possibles et au-delà. […] Nous serons aux côtés de nos auteurs, journalistes et des groupes de presse qui légitimement défendent leurs intérêts face à des propositions (de Google, ndlr) qui sont jusque-là inacceptables. […] Par le droit voisin, c’est l’âme européenne que nous voulons défendre », ajoutant que « la valeur ne réside pas seulement dans le tuyau qui diffuse l’information ».

Le duo franco-allemand a tenu une conférence de presse à l'issue du conseil. - DDM Lucas Serdic
Le duo franco-allemand a tenu une conférence de presse à l'issue du conseil. - DDM Lucas Serdic

Le port du voile

Face à la polémique grandissante sur le port du voile, qui agite aussi la majorité, Emmanuel Macron a appelé mercredi à ne pas "stigmatiser" les musulmans, en dénonçant un "raccourci fatal" entre lutte contre le terrorisme et islam.

"Faisons bloc et ne nous divisons pas pour lutter d'abord et avant tout contre la radicalisation dans notre société, oeuvrons pour que la République soit partout", a ajouté le chef de l'État, lors d'une conférence de presse à l'issue d'un sommet franco-allemand à Toulouse, tout en appelant à "être intraitable avec le communautarisme".

La mise au point a suivi celle du Premier ministre, qui avait tenté de clore le débat, d'abord mardi à l'Assemblée nationale, puis mercredi au Sénat.

Attaché à siffler la fin de la récréation, Édouard Philippe a répété devant les chambres parlementaires qu'il ne souhaitait pas "faire une loi sur les accompagnants scolaires", pointant plutôt "l'enjeu" des "dérives communautaires" et de la "déscolarisation".

Le ministre de l'Éducation, Jean-Michel Blanquer, qui a affirmé dimanche que "le voile en soi n'est pas souhaitable dans notre société", a lui aussi tenté mercredi d'éteindre l'incendie, en assurant qu'il y avait "des sujets beaucoup plus importants relatifs à la laïcité".

Las.

Les deux camps continuent de s'affronter, à fleurets de moins en moins mouchetés, au sein même de la majorité sur un sujet aussi inflammable que récurrent en France, qui a été relancé vendredi lorsqu'un élu du Rassemblement national (RN) a invectivé une mère voilée en pleine séance du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté.

"Je considère que le voile islamique n'est pas l'avenir souhaitable de la culture et de la société française", a répété sur Europe 1 le ministre de l'Économie Bruno Le Maire, tout en estimant qu'il n'y avait "pas nécessairement besoin de loi" en la matière.

La députée Aurore Bergé, porte-parole de LREM, s'est elle dite prête à voter une proposition de loi LR sur l'interdiction du voile lors des sorties scolaires. "Je suis cohérente avec des convictions que j'ai toujours eues.", a-t-elle déclaré à LCP.

Plusieurs députés LREM, dont Coralie Dubost, Cécile Rilhac, Eric Bothorel, Fannette Charvier et Amelia Lakrafi lui ont immédiatement répondu "Not in my name" ("pas en mon nom") sur Twitter.

A lire aussi : France/Allemagne : des désaccords de plus en plus visibles

Zone rouge au centre-ville de Toulouse

Pendant ce temps, impossible de circuler et de stationner dans le quartier de la préfecture. Une zone rouge a été établie pour interdire la circulation et le stationnement jusqu'à 23 heures ce mercredi soir. Une seconde zone, la zone orange, interdit uniquement la circulation. Pour faire respecter ces interdictions, de très nombreux CRS sont présents.

A lire aussi : Un quartier de Toulouse entièrement bouclé pour la venue de Macron et Merkel

Les passants sont contrôlés par les policiers pour rentrer dans l'hyper centre de Toulouse. - Photo DDM, Nathalie Saint-Affre
Les passants sont contrôlés par les policiers pour rentrer dans l'hyper centre de Toulouse. - Photo DDM, Nathalie Saint-Affre

En fin de journée, Emmanuel Macron et Angela Merkel seront rejoints par Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne. Ils participeront ensuite à un dîner avec l'european roundtable of industrialists qui regroupe les dirigeants des grandes entreprises industrielles européennes.

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