Quel bilan pour l'accord de Paris ?
Accord de Paris pour quel bilan des 195 pays signataires ?
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François Gemenne, membre du Giec et spécialiste des questions de géopolitique de l’environnement
https://youtu.be/tgnTa6fyK8c Une rue inondée de Amta, ville située à une soixantaine de kilomètres de Calcutta, en Inde, le 5 août 2021. [caption id="attachment_295932" align="alignnone" width="1200"]
La neutralité carbone, nouveau standard des engagements climatiques
Les actes concrets ont beau se faire attendre, l’accord de Paris n’en reste pas moins une étape importante dans la lutte contre le réchauffement climatique. Lors de la COP21, la communauté internationale formulait un objectif clair pour limiter le réchauffement climatique de la planète à moins de 2 °C par rapport au niveau de l’ère préindustrielle et l’inscrivait pour la première fois dans un traité international. Depuis, l’accord de Paris fait référence en matière d’action climatique et de nombreux États, villes ou entreprises vont même désormais plus loin en affichant un objectif de neutralité carbone à horizon 2050. [caption id="attachment_295938" align="alignnone" width="1200"]


Des mises en application concrètes repoussées à plus tard
La condamnation de la France pour l’insuffisance de son action climatique à deux semaines du début de la COP26 tombe comme une piqûre de rappel. La décision souligne toute la difficulté que les États signataires de l’accord de Paris éprouvent pour mettre en œuvre leurs engagements. Car six ans après la COP21, force est de constater que le virage vers une diminution drastique des émissions de gaz à effet de serre n’a pas été pris. "Le monde se dirige toujours vers une augmentation des températures à hauteur de 3 °C au cours de ce siècle : c’est bien au-delà des objectifs de l’accord de Paris", constate le rapport 2020 du PNUE sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions. https://twitter.com/valmasdel/status/1428725141832355848 Et pour cause, l’année 2020, marquée par une intensification des incendies, des sécheresses, des tempêtes et de la fonte des glaciers, a été l’une des années les plus chaudes jamais enregistrées – avec 2016 et 2019 – selon l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Malgré ces effets très visibles du changement climatique, les pays signataires de l’accord de Paris prennent leur temps pour amorcer une décrue drastique de leurs émissions de GES.Les émissions mondiales ont continué d’augmenter, pour atteindre en 2019 le chiffre record
Les objectifs restent élevés, mais toujours repoussés à plus tard. Ainsi, entre 2015 et 2021, les émissions mondiales ont continué d’augmenter, pour atteindre en 2019 le chiffre record de 52,4 milliards de tonnes (ou gigatonnes) d’équivalent CO2, et même 59,1 en incluant les émissions dues au changement d’affectation des terres. [caption id="attachment_295923" align="alignnone" width="1200"]

Russie, cinquième plus gros émetteur mondial
Les actions de l’Inde, quatrième plus gros émetteur mondial, et de la Russie, cinquième plus gros émetteur mondial, sont quant à elles jugées respectivement "très insuffisantes" et "extrêmement insuffisantes". https://twitter.com/climateactiontr/status/1438049513927692290 Le rapport de synthèse de l’ONU sur les CDN, publié le 17 septembre, confirme l’analyse du Climate Action Tracker. Il note que les feuilles de route soumises par les 191 parties de l’accord de Paris impliquent une "augmentation considérable" des émissions mondiales de GES en 2030 par rapport à 2010, de l’ordre de 16 %. Or, pour Patricia Espinosa, secrétaire exécutive d’ONU Climat, cette augmentation "est un énorme sujet de préoccupation". "Elle contraste fortement avec les appels lancés par la science en faveur d'une réduction rapide, soutenue et à grande échelle des émissions afin de prévenir les conséquences climatiques les plus graves et les souffrances, notamment des plus vulnérables, dans le monde entier", ajoute-t-elle. Par ailleurs, de nombreuses feuilles de route soumises par des pays en développement contiennent des engagements conditionnels, qui ne pourront être mis en œuvre qu’avec une aide financière extérieure. Cette question du financement des objectifs climatiques et de l’aide apportée par les pays du Nord en direction des pays du Sud est un autre aspect crucial de l’accord de Paris. Elle sera l’un des enjeux de la COP26. Un homme debout au milieu de bateaux échoués sur le fond asséché du lac Chilwa, le 18 octobre 2018, au Malawi. [caption id="attachment_295930" align="alignnone" width="1200"]
L’enjeu crucial du financement des objectifs climatiques
Lors de la COP15 de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) à Copenhague, en 2009, les pays développés s’étaient engagés à un objectif collectif de mobilisation de 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 pour l’action climatique dans les pays en développement. Douze ans ont passé, mais les 100 milliards n’ont toujours pas été atteints. Selon un rapport de l’OCDE publié en septembre 2021, le financement climatique en faveur des pays en développement a atteint 79,6 milliards de dollars en 2019, soit un déficit de plus de 20 milliards de dollars. Et les trois quarts de ces financements concernent l’atténuation du changement climatique – tout ce qui concerne la réduction des émissions de GES, comme le développement des énergies renouvelables. Pourtant, l’accord de Paris stipulait précisément qu’un équilibre était nécessaire entre financements destinés à l’atténuation et à l’adaptation – tout ce qui permet de faire face aux conséquences du changement climatique, comme la construction de digues pour empêcher des inondations.A lire aussi
Autre motif d’inquiétude : 71 % de ces financements sont fournis sous forme de prêts, selon l’ONG Oxfam, qui affirme que le volume de financements climat sous forme de dons n’a presque pas changé, passant d’environ 11 milliards de dollars en 2015-2016 à 12,5 milliards de dollars en 2017-2018. "Il nous apparaît particulièrement choquant que des pays pauvres, qui ont historiquement peu contribué au réchauffement climatique, se retrouvent en situation de devoir emprunter et alourdir leur dette avec des taux exorbitants", regrette Armelle Le Comte, responsable du plaidoyer climat à Oxfam France. https://twitter.com/OECD_ENV/status/1438814674691268616 Selon elle, la question du financement est "l’un des piliers de l’accord de Paris qui cimente la confiance entre les pays du Nord et les pays du Sud" et il sera très certainement beaucoup question de justice climatique à la COP26 dans les discours des dirigeants des pays en développement. "Des milliards sont sortis pour aider les entreprises au moment de la pandémie, on a su trouver l’argent. Il faudrait faire le même effort pour l’urgence climatique. Les pays développés doivent s’entendre sur la définition d’une nouvelle voie pour les financements climat après 2020", ajoute Armelle Le Comte.La question du financement est aussi celle des choix d’investissements opérés par les États et les investisseurs privés.
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Par Kafunel Avec Texte : Romain Brunet Vidéo : Pauline Paccard Photos : AFP Secrétaires de rédaction : Jean-Luc Mounier, Solène Peynot Rédacteur en chef : Stéphane Bernstein Conception, graphisme et développement : Studio Graphique - France Médias Monde Direction de la rédaction : Vanessa Burggraf, Amaury Guibert Octobre 2021 © Tous droits réservés
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