Donald Trump s'est exprimé à la Maison Blanche jeudi 5 novembre. Dans un discours truffé d'allégations sans preuves – à tel point que plusieurs chaînes de télévision ont choisi d'arrêter la diffusion en direct de son intervention –, le président américain a accusé le camp démocrate de tenter de lui « voler l'élection » dont il revendique la victoire. Malgré l'appel au calme de Joe Biden, les deux camps sont maintenant à couteaux tirés tandis que les dépouillements en Géorgie et en Pennsylvanie parvenaient laborieusement à leur terme.
Dans un discours d'une quinzaine de minutes lu en direct à la Maison Blanche, jeudi à 18h45 (heure de Washington), le président américain Donald Trump s'est posé, sans la moindre preuve, en victime d'une vaste fraude électorale.
Trump accuse les démocrates de tenter de lui «voler l'élection»
Il s'est proclamé vainqueur de l'élection, en décalage flagrant avec les résultats de plus en plus favorables à son adversaire démocrate Joe Biden. En fin de discours, il a même mentionné des « centres de dépouillements secrets ».
Isolé au sein de son propre parti dans sa croisade contre un « vol » du scrutin dont il serait la victime, le 45e président des États-Unis, fatigué, presque abattu, a donné le spectacle d'un dirigeant tentant de s'accrocher maladroitement au pouvoir au crépuscule de son mandat.
Sa principale déclaration : « Si vous comptez les votes légaux, je gagne facilement. Si vous comptez les votes illégaux, ils peuvent essayer de nous voler l'élection », a-t-il lancé depuis la salle de presse de la Maison Blanche, dans une tirade souvent confuse, truffée d'approximations et de contrevérités sur le décompte en cours.
Les « votes illégaux » auxquels il fait allusion sont en fait les bulletins de vote par correspondance, plus favorables à son adversaire, ce qui explique la remontée de Joe Biden dans les dépouillements dans différents États.
Des télévisions américaines coupent l'allocution
Alors que Donald Trump venait de dire qu'il allait gagner « facilement » si « les votes légaux » étaient comptés, mais que si l'on incluait « les votes illégaux », les démocrates pouvaient « essayer de nous voler l'élection », très vite, la chaîne MSNBC a cessé sa diffusion en direct.
« Bon, nous voilà encore dans la position inhabituelle de (devoir) non seulement interrompre le président des États-Unis, mais aussi de corriger le président des États-Unis », a lâché le présentateur, Brian Williams.
Les chaînes NBC News et ABC News ont, elles aussi, interrompu la diffusion de cette conférence de presse qui n'en fut finalement pas une, puisque le président a quitté le pupitre sans prendre de questions.
De son côté, CNN, bête noire du président sortant, a décidé de ne pas couper le micro à Donald Trump, mais son présentateur vedette Jake Tapper a enchaîné avec une condamnation sans appel du chef de l'État.
« Quelle triste nuit pour les États-Unis d'Amérique de voir leur président [...] faussement accuser les gens d'essayer de voler l'élection », a-t-il déclaré, en fustigeant un « tissu de mensonges ».
La presse n'est pas en reste devant le spectacle offert par l'ancien comédien de télévision devenu hôte de la Maison Blanche. Entre autres exemples, le magazine USA Today, avec ce message sans concession :« Notre travail est de dire la vérité, pas des complots infondés. »
La revue a ensuite entrepris une vérification des dires (« fact-checking ») du président.
Même le journal conservateur The New York Post, qui a officiellement pris et fait et cause pour Donald Trump dans cette campagne, s'est désolidarisé de ses « allégations infondées ».
« Personne ne nous prendra notre démocratie. Ni aujourd'hui, ni jamais », a tweeté peu après Joe Biden. Quelques heures plus tôt, le candidat démocrate s'était dit certain, dans une allocution à la tonalité présidentielle, de sa victoire imminente. « Je demande à tout le monde de rester calme.
Le processus fonctionne, le décompte s'achève et nous saurons très bientôt », a-t-il déclaré depuis le Delaware. « Nous n'avons aucun doute sur le fait que lorsque le dépouillement sera terminé, [...] nous serons déclarés vainqueurs. »
Géorgie, Pennsylvanie, Arizona... ces États qui se font attendre
Les États-Unis, qui attendaient de connaître le nom du président qui prêtera serment le 20 janvier, avaient les yeux rivés sur la Pennsylvanie qui, avec ses 20 grands électeurs, pourrait mettre fin au suspense. Si l'ancien vice-président de Barack Obama remporte cet État industriel, il deviendra le 46e président américain.
Les 20 grands électeurs de cet État lui permettraient en effet de franchir le seuil de 270 – la majorité du collège électoral – qui le propulserait à la Maison Blanche et ferait de Donald Trump le président d'un seul mandat.
L'avance initiale de Donald Trump au soir de l'élection dans cet État a fondu au fur et à mesure que les bulletins envoyés par courrier – à 80% en faveur de Joe Biden – étaient comptés. Toute la journée, les responsables locaux de Géorgie, Pennsylvanie, Arizona et Nevada ont communiqué des statistiques sur les bulletins restant à compter, faisant fluctuer l'heure ou le jour où ils auront achevé les dépouillements des bulletins envoyés par la poste.
Depuis mercredi, l'écart s'est resserré en Géorgie. Le résultat final dans cet État traditionnellement conservateur avait été promis pour la mi-journée, un engagement non tenu.
À l'inverse de la Pennsylvanie et de la Géorgie, Donald Trump bénéficie directement, dans l'Arizona, de la prolongation du dépouillement.
Il était en train de rattraper Joe Biden, risquant de faire perdre au démocrate les 11 grands électeurs qu'AP et Fox News avaient attribués à Joe Biden dès la nuit électorale de mardi, sur la base de résultats partiels et de modèles statistiques, une méthode habituellement très sûre.
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C'est là, à Phoenix, qu'une foule pro-Trump s'est massée, à l'extérieur d'un site de dépouillement, aux cris de « Comptez les voix ! » et de « Honte à Fox ».
Mais dans les États où Donald Trump était derrière Joe Biden, ses partisans lançaient « Stoppez le vote ! », demandant d'invalider les bulletins non comptés le jour même de l'élection, ce qui est pourtant légal.
C'était notamment le cas à Détroit (Michigan). Le président républicain avait déclaré, dans la première nuit post-élection, qu'il avait gagné l'élection et qu'il ferait intervenir la Cour suprême, restant évasif sur les motifs.
En réalité, ses avocats ont saisi la justice des États selon l'objectif recherché localement, avec par exemple la menace de demander un recomptage dans le Wisconsin.
Les démocrates estiment les plaintes sans fondement. Mais, selon les décisions de multiples juges, ces recours pourraient retarder de plusieurs jours ou semaines l'homologation des résultats. Dans le Michigan et la Géorgie, deux juges ont déjà rejeté des recours républicains.
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