Radiographie du Procès France Télécom : Un système de harcèlement moral

France-Telecom plant taken on April 26, 2011 in Merignac, southern France. It is the latest in a series of suicides at France Telecom, where more than 30 reported suicides in 2008 and 2009 . AFP PHOTO /PHOTO PATRICK BERNARD / AFP PHOTO / PATRICK BERNARD
France-Telecom plant taken on April 26, 2011 in Merignac, southern France. It is the latest in a series of suicides at France Telecom, where more than 30 reported suicides in 2008 and 2009 . AFP PHOTO /PHOTO PATRICK BERNARD / AFP PHOTO / PATRICK BERNARD

Sept prévenus, dont d’anciens dirigeants de l’entreprise, comparaissent à partir de lundi devant le tribunal correctionnel de Paris à la suite de la vague de suicides de salariés entre 2007 et 2010.

Au siège de France Télécom, dans le 15e arrondissement à Paris, le comité exécutif est réuni.

Les derniers chiffres du trafic des lignes téléphoniques fixes viennent de lui être transmis. Autour de la table, on veut croire à une erreur. Un effondrement pareil, c’est impossible.

On vérifie. « Les chiffres étaient malheureusement justes », se souvient Louis-Pierre Wenes, alors président d’Orange France et numéro 2 de France Télécom.

C’était à l’automne 2006. Pendant l’été, le trafic de la voix sur Internet avait explosé. Sur le marché des télécommunications, ouvert à la concurrence depuis la fin des années 1990, de nouveaux opérateurs bousculaient la vieille maison.

Le « dégroupage » imposé en 2002 par la réglementation européenne leur avait donné accès à la boucle locale – les bandes de fréquence du cuivre.

Sur tout le territoire, la guerre s’intensifiait à coups d’innovations technologiques et de baisse des tarifs. La dette de France Télécom s’était envolée, son chiffre d’affaires et ses marges avaient plongé.

Ce contexte économique est le cœur de la défense des sept prévenus qui comparaissent à compter du lundi 6 mai devant le tribunal correctionnel de Paris pour répondre de « harcèlement moral » ou de complicité de ce délit, en leur qualité d’anciens membres de la direction de France Télécom.

Ouvrir les 673 pages de l’ordonnance de renvoi, c’est tomber sur une litanie de prénoms et de noms comme on en voit gravés sur les monuments aux morts des villages

Parmi eux, l’ancien PDG, Didier Lombard, son directeur exécutif, Louis-Pierre Wenes, et le directeur groupe des ressources humaines, Olivier Barberot, poursuivis en tant qu’auteurs principaux d’une stratégie d’entreprise « visant à déstabiliser les salariés et agents, à créer un climat professionnel anxiogène » et ayant eu « pour objet et pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité » des salariés, un délit puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

L’entreprise France Télécom, personne morale, est elle aussi renvoyée devant le tribunal.

Lire aussi  Suicides à France Télécom : des dirigeants menacés de poursuites pour harcèlement moral

Trente-neuf personnes ont été retenues en qualité de victimes dans ce dossier. Parmi elles, dix-neuf se sont donné la mort entre 2007 et 2010.

Ouvrir les 673 pages de l’ordonnance de renvoi signée de la juge d’instruction Brigitte Jolivet, c’est d’abord tomber sur une litanie de prénoms et de noms comme on en voit gravés sur les monuments aux morts des villages. (....)

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