L’accès à la terre demeure toujours une préoccupation pour la femme burkinabè. Pourtant, de plus en plus, sa contribution au développement devient indispensable.
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Quand l’accès des femmes à la terre au Burkina-Faso demeure toujours une préoccupation (étude)
Selon le recensement général de 2006, 51,7% de la population burkinabè est constituée de femmes et plus de la moitié de celles-ci utilise la terre comme moyen de subsistance.
Majoritaires et défavorisées, elles exploitent, le plus souvent, des lopins de terre empruntés aux hommes, avec l’épée de Damoclès au-dessus de leur tête : la peur de se faire exproprier, à tout moment.
Il est 6h passées de quelques minutes; le soleil fait son apparition, annonçant ainsi un jour nouveau dans la commune rurale de Léo. A quelques kilomètres de la ville, des femmes de l’association Amaria Yidia, comme d’habitude, sont dans leur champ.
Daba à la main, elles débarrassent les semis des mauvaises herbes. « Nous avons entrepris cette activité depuis 1992. A chaque saison pluvieuse, on emprunte une portion de terre à quelqu’un et nous sommes tenues de la rendre quand il en a besoin.
Parfois, cela se fait au moment où on ne s’y attend pas. Face à cette situation, nous avons décidé d’avoir notre propre terrain », explique la porte-parole de l’association Amaria Yidia, Abibata Ido.
« Nous avons compris que seule un titre foncier peut nous permettre de mener à bien notre activité. Dès lors, nous sommes allés voir le chef de terre en 1997, en vue de nous aider à acquérir notre propre lopin de terre. Heureusement, il a exaucé notre vœu », poursuit-elle.
Par coup de chance, la portion de terre se situe dans une zone aménagée en 2004. Après l’aménagement, le groupement s’est retrouvé propriétaire terrien, le tout couronné par une Attestation de possession foncière rurale (APFR).
« Avec cette attestation, nous avons délimité un champ de groupe et chaque femme possède désormais, une parcelle pour mener ses propres activités agricoles », confie Mme Ido. Mener cette activité permet à la femme de subvenir à ses besoins.
« A chaque saison, la production peut atteindre 6 à 8 sacs de 100 kg de riz. Une partie est destinée à la consommation.
« La terre appartient toujours à l’homme »
L’autre moitié du riz est étuvé et vendu. Ce qui nous permet de payer la scolarité des enfants. Avec cet argent, des femmes ont pu s’acheter des vélos pour leur déplacement », témoigne Mme Ido.
Cet exemple montre combien les femmes en milieu rural ont du mal à s’approprier un titre foncier, car cet acte est une garantie et sécurise l’espace cultural. Et comme ces dames, bon nombre de femmes aspirent acquérir une APFR au Burkina Faso.
Mais le bout du tunnel ne semble pas pour demain, car dans beaucoup de sociétés burkinabè l’idée de la femme propriétaire terrienne est difficilement concevable.
« A titre d’exemple, dans la société moaga, la femme n’a pas droit à la terre, à plus forte raison de prétendre en être propriétaire », confesse la responsable chargée des femmes de la province de la Sissili, Ramata Tiendrébeogo.
« Je n’ai pas de champ à moi, je cultive dans le champ de mon mari avec mes enfants», confirme Mamounata Walbéogo. Par opposition à cette culture, dans la communauté gourounsi, toute personne de la famille a droit à un lopin de terre, grâce à l’héritage familial.
« Dans la culture gouronsi, les femmes ont droit à la terre par le biais de l’héritage. Ainsi, lorsque le père lègue des terres à ses enfants à sa mort, elles sont partagées sans distinction entre les filles et les garçons de la famille», confirme Josiane Yago, une habitante.
Sans justification parfois, les hommes refusent d’impliquer la femme dans les questions foncières. Et certains propos sont édifiants: « qu’est- ce qu’une femme pourrait bien faire avec un champ ?
La femme est sous le couvert toujours d’un homme. Par conséquent, elle n’a pas besoin d’être propriétaire terrienne. Donner aux femmes le droit de posséder la terre équivaut à hypothéquer une partie du patrimoine foncier du lignage.
Car un jour ou l’autre, elle pourrait abandonner son foyer pour un autre. Ainsi, la terre sécurisée appartiendrait à son nouveau époux », souligne l’animateur foncier, Abdoulaye Zizien.
« La terre appartient toujours à l’homme », renchérit la responsable chargée des femmes de la province de la Sissili.
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